Avant l’invention et la diffusion de l’écriture, il n’y avait que l’interprétation. Dans des communautés développées où on savait lire et écrire, la traduction était considérée comme étant la conversion d’un texte écrit dans une langue en un texte écrit dans une autre langue. Or, l’apparition de l’interprète simultané et de l’interprète de conférence maintient l’interprétation toujours en vie.
La tâche d’un traducteur et d’un interprète est la même indépendamment du fait s’il s’agit d’un message oral ou d’un texte écrit. Néanmoins il faut souligner que la traduction écrite permet de mieux ajuster le style et de mieux maîtriser la terminologie technique. Les problèmes principaux de la traduction sont connus depuis l’Antiquité. Ils ont été formulés entre autres par Saint Jérôme le traducteur de la Bible en latin, la Vulgate, de l’hébreu et du grec.
Du point de vue sémantique, ces problèmes sont liés à l’ajustement de la signification littérale et du sens littéraire. D’un autre côté les conflits apparaissent entre la traduction exacte de chaque mot dans une phrase et l’interprétation du sens de la phrase entière ou même du texte entier qui doit transmettre autant que possible le message original du texte.
Ces problèmes et conflits apparaissent en raison des facteurs qui sont inhérents à l’usage et au fonctionnement d’une langue particulière, car les langues n’opèrent pas dans l’abstrait et font partie des cultures. Il faut toujours se rappeler que les cultures diffèrent les unes des autres à plusieurs points de vue. Même entre les langues des sociétés dont les cultures sont assez rapprochées il n’y a pas d’équivalences lexicales exactes entre les mots de leurs vocabulaires.
On peut définir la culture comme un mode de vie et ses manifestations qui sont particulières à une société qui utilise une langue spécifique comme son moyen d’expression. Plus particulièrement l’élément culturel de la langue diffère de la langue universelle et de la langue personnelle. Plusieurs cultures (et sous-cultures) peuvent exister dans une même langue et cela exige des traductions au sein de cette langue. Par exemple, il y a divers mots pour désigner le même objet en Suisse, en Autriche, en Allemagne de l’est et de l’ouest. Souvent quand la culture entre en jeu, il y a un problème de traduction qui est dû à un fossé culturel ou à une distance entre la langue source et la langue cible. On ne devrait pas considérer que la langue est une composante ou un trait de la culture, car s’il en était ainsi la traduction serait impossible.
Dans leur signification lexicale, les mots acquièrent diverses teintes de sens et ont des connotations qui ne sont pas partagées par les mots leur correspondant au plus près dans d’autres langues. Cela peut rendre la traduction littérale assez tordue. Par exemple, à l’époque moderne les traducteurs de la Bible dans les langues des sociétés qui sont éloignées de la culture européenne ont bien conscience des difficultés de trouver un équivalent lexical du mot « l’agneau », quand leurs lecteurs même s’ils ont vu des brebis et des agneaux, ne connaissent ni la tradition du sacrifice sanglant pour expier ni les associations du mot agneau avec les notions de l’adorable, de l’innocent et du sans défense.
La traduction de la poésie est le domaine où toute l’emphase est placée sur la création d’un nouveau poème indépendant et où la traduction littérale est en général condamnée. Plus la qualité du poème original est meilleure, plus le travail du traducteur devient difficile. Cela est dû au fait que la poésie a pour but d’exprimer en premier lieu exactement ce que son auteur veut exprimer. Deuxièmement afin de réaliser cet objectif, le poète maîtrise toutes les ressources de la langue dans laquelle il écrit, il maîtrise la concordance des mots, leur ordre et les structures grammaticales sans oublier ses particularités phonologiques qu’il transpose dans le mètre, la rime, l’assonance et l’allitération. Les ressources disponibles diffèrent d’une langue à autre, le traducteur doit adapter l’exploitation des ressources particulières dans la langue source à celles dont dispose dans la langue cible. En raison du fait que les considérations portant sur le lexique, la grammaire et le mètre sont entrelacées en poésie, une traduction littéraire satisfaisante est d’habitude bien différente d’une traduction littérale. Plus un poète se fie à la forme de la langue, plus ses vers sont intégrés sans cette langue et il est bien plus difficile de les traduire de manière adéquate. C’est bien vrai pour ce qui est de la poésie lyrique à cause des jeux de mots, de rimes compliquées et des assonances fréquentes.
Par contre la traduction technique et spécialisée se trouve à l’opposé. La traduction technique couvre, d’un côté, la traduction spécialisée et de l’autre la traduction institutionnelle, politique, commerciale, financière, etc. La traduction technique semble être non-culturelle et pourtant elle est liée bel et bien à la culture. On pourrait l’appeler « la traduction universelle » étant donné que les bienfaits de la technologie ne sont pas réservés à une communauté parlant une seule langue. En principe les termes doivent être traduits. La traduction institutionnelle est culturelle à moins qu’elle ne serve les organisations internationales. La traduction technique a lieu d’habitude dans l’entourage des termes institutionnels et commerciaux. On pourrait prétendre qu’il s’agisse en l’occurrence des textes qui sont les plus faciles à traduire en raison de l’unification culturelle, de la correspondance entre les termes et de la similarité stylistique qui n’existent pas dans d’autres domaines du discours.
La traduction technique, commerciale et institutionnelle est celle qui se prête le mieux aux techniques automatisées de la traduction qui se sont généralisées à l’époque actuelle. Quant à la littérature et surtout à la poésie, elles se prêtent moins bien aux essais d’automatisation de la traduction.
La traduction est plus un art qu’une science. Il est seulement possible seulement d’en enseigner les principes et de donner des conseils. En somme le processus de la traduction est laissé à la sensibilité dont le traducteur est doté dans les langues source et cible. D’habitude dans la traduction d’une œuvre littéraire une partie des intentions originales de l’auteur est perdue. Ainsi l’épigramme italienne « traduttore traditore » demeure bien souvent justifiée.